par Iulia Cojocariu
Vladimir Ghika a mené un apostolat intellectuel et culturel par ses écrits de spiritualité, ses articles, ses conférences, ses prises de position dans la presse de son temps sur divers sujets d’actualité alors en vogue (surtout concernant l’unité de l’Église, mais aussi sur d’autres sujets), mais aussi par son talent artistique, sa correspondance avec les intellectuels rencontrés, son implication dans les manifestations des « Journées d’art religieux » et de la « Semaine des Écrivains Catholiques » (de France), ou encore la rédaction de pièces de théâtre.
Bien que l’on puisse inscrire Vladimir Ghika dans l’ensemble du mouvement de renouveau catholique français, bien qu’il ait entretenu des relations étroites avec de nombreux intellectuels catholiques de son temps et ait été impliqué dans diverses manifestations de l’humanisme chrétien, sa personnalité n’a guère été retenue par les auteurs ayant étudié ce phénomène. Cela est peut-être dû au fait que l’activité de Vladimir Ghika était très variée et que le côté intellectuel n’en était qu’un aspect. Ses nombreux voyages[1], les projets caritatifs dans lesquels il s’impliquait lui laissaient peu de temps pour écrire ou pour répondre à toutes les demandes de conférences.
Le 22 juillet 1919, un appel est lancé par le Comité International de l’Œuvre de Louvain[2], que Vladimir Ghika signe avec de nombreux intellectuels catholiques français. Cet appel provient d’écrivains, universitaires et artistes et s’adresse à l’élite intellectuelle mondiale. Il y est dit que « le monde ne peut oublier le rôle, les services rendus, ni les acquisitions définitives dont Louvain a enrichi son patrimoine intellectuel ». L’université était aussi l’un des centres les plus actifs de la pensée religieuse. L’appel disait aussi :
[La Science] ne laissera pas disparaître les grands foyers destinés à répandre une même lumière. Quand un d’eux est brutalement éteint, tous sont frappés, car c’est une diminution de pensée et de vie qui se fait dans l’humanité même. (…) Monuments, musées, bibliothèques, toutes ces richesses du passé forment le trésor commun de la grande famille humaine, que le génie de chacun de ses fils doit contribuer à accroître[3].
L’appel précise également qu’il faut tenir compte des traités conclus, du droit des nations, des gens, de leur dignité, qui représentent une tradition intellectuelle séculaire et des principes éternels[4].
Un Comité International pour promouvoir la restauration de l’Université et de la Bibliothèque de Louvain a été créé[5] à l’initiative d’Étienne Lamy[6] et d’Imbart de La Tour[7]. L’appel est adressé au nom de 150 universités et académies. Vladimir Ghika est partie prenante à ce comité et il joue un rôle important dans le soutien à la cause de la Belgique et de l’effort de restauration de l’Université de Louvain et de sa bibliothèque. En 1918, le 26 août, quatre ans après l’incendie de Louvain, une réunion de ce comité se tient au Havre, au cours de laquelle Vladimir Ghika prononce un long discours. É. Lamy, Imbart de La Tour, Mgr Simon Deploige[8] (avec qui Vladimir Ghika entretenait une profonde amitié[9]) s’expriment à la même occasion. De même, des discours sont prononcés de la part de l’Espagne, de la Suisse et des États-Unis.
Un écho de cette action menée par Vladimir Ghika en faveur de la Belgique apparaît dans une lettre que lui adresse le cardinal Mercier[10] en 1920[11] :
Je n’ai pas oublié le zèle que vous avez mis à défendre à Rome durant le conflit mondial la cause de la Belgique martyre ; vous obéissiez à l’élan généreux de votre cœur, vous sentiez que vous défendiez la cause de la civilisation chrétienne. Je tiens à vous remercier de votre activité d’alors ; je veux aussi vous remercier de la part prise par vous à la résurrection de Louvain ; vous vous êtes noblement employé à appeler sur l’Université en cendres les sympathies du public, et, représentant la Roumanie dans notre Comité international, à diriger vers elle le fraternel concours de vos compatriotes.
À Louvain, à l’Institut Supérieur de Philosophie, Vladimir Ghika donne une conférence en 1921 à l’occasion du 600e anniversaire de la naissance de Dante Alighieri. La conférence est intitulée « Autour dʼun Centenaire. 1321-1921. La philosophie des Centenaires. LʼActualité de Dante. Dante et le péché contre les étoiles[12] ».
Dans l’Entre-deux-guerres, les intellectuels catholiques commencent à affirmer clairement leur identité. Apparaissent alors diverses associations et groupes qui les rassemblent ; c’est aussi en partie une réaction face à une société qui se laïcise, qui cherche à échapper à la tutelle de la religion et à s’affirmer indépendamment de l’influence de l’Église[13]. Au début, ils se groupent en catégories professionnelles. Les artistes liés à la création littéraire et artistique se regroupent au sein de l’association « Les Catholiques des Beaux-Arts ». Au début des années 1920, l’Association des Écrivains Catholiques est créée. Elle organise chaque année la « Semaine des écrivains catholiques »[14].
Les intellectuels catholiques s’affirment d’abord dans le domaine de la littérature : dans la poésie, le roman, le théâtre, et un peu dans la philosophie. Dans ces directions, ils prouvent leur influence et gagnent en estime. Il y a à cette époque un fait social important, celui des conversions d’écrivains, qui sont nombreuses[15].
Il existe de nombreuses revues d’orientation catholique déclarée ou ayant des intellectuels catholiques au centre de leur activité, comme Esprit, Le Roseau d’Or, Les Cahiers de la nouvelle journée. Le cercle Jacques Maritain de Meudon est actif, attirant de nombreux écrivains français et étrangers, dont Vladimir Ghika[16].
L’activité intellectuelle de Monseigneur Ghika se manifeste principalement jusqu’à son départ de France. Après son arrivée en Roumanie en 1939, la situation historique change, la Seconde Guerre mondiale éclate, une période de crise secoue la société roumaine et la dernière partie de la vie de Vladimir Ghika est marquée par la persécution, l’arrestation, la détention, la mort en prison[17]. C’est pourquoi l’activité éditoriale menée par Vladimir Ghika couvre surtout la période précédant son retour définitif en Roumanie en 1939. Il publie plusieurs articles historiques, théologiques et spirituels dans des revues en Roumanie et en France, comme Convorbiri literare, Revista Catolică, Le Correspondant[18], La Revue des Jeunes[19], La Revue Universelle[20], La Croix[21], La Documentation Catholique[22], La Revue hebdomadaire[23], Le Monde Catholique illustré[24], La Documentation française[25], Revue apologétique[26].
Articles de spiritualité
Le premier article publié par Vladimir Ghika semble être celui intitulé Le Trois Mars (1902). L’article, écrit à la louange du pape Léon XIII, qui célèbre cette année-là ses 92 ans de vie et ses 25 ans de pontificat, provoque une réaction controversée dans le journal Epoca où, sous la signature de Baba Novak[27], un journaliste attaque Vladimir Ghika en le qualifiant de « nouvel apostat ». À cette époque, ce journaliste écrit une série d’articles intitulée « La Propagande papiste » dans laquelle il s’en prend à l’Église catholique. En réponse à Baba Novak, Vladimir Ghika prépare une lettre ouverte. Intitulée « Pas apostat, mais apôtre », la réponse est adressée au directeur de la publication. Dans cette longue lettre[28], datée du 18-21 mai 1902, Vladimir Ghika répond aux accusations portées contre lui et fait une belle profession de foi et d’engagement de vie. Cela montre également à quel point il se soucie de l’unité de l’Église, une idée qu’il cherchera à soutenir et à défendre toute sa vie.
Vladimir Ghika s’arrête également sur la figure d’un autre Souverain Pontife, en la personne du Pape Benoît XV. Les Archives Vladimir Ghika conservent un brouillon rédigé par Monseigneur d’un article intitulé « L’Héritage de Benoît XV ». Le texte est écrit en février-mars 1922 et est préparé pour être publié dans La Revue hebdomadaire. Le pape Benoît XV est mort le 22 janvier 1922. L’article n’a jamais été publié, mais le brouillon a été conservé. Monseigneur possédait un portrait dédicacé du pape Benoît XV daté du 30 avril 1915, moins d’un an après son élection comme souverain pontife. Il en avait également un de Pie XI, daté du 12 février 1925, qui reconnaissait son mérite pour son travail en faveur des réfugiés russes[29].
Toute sa vie, Vladimir Ghika a gardé l’habitude d’écrire sur des bouts de papier diverses « pensées », aphorismes. Ces « pensées » écrites pour la plupart sur de petits morceaux de papier, représentent en quelque sorte son chef-d’œuvre, qui n’a été publié qu’en très petite partie. Leur nombre est très élevé, soit environ 80 000. Au cours de sa vie, Monseigneur Ghika a fait diverses éditions et sélections de ces « petits billets » comportant des pensées et les a publiées dans plusieurs maisons d’édition et dans plusieurs revues en France et en Roumanie. En France, une sélection de « pensées » a paru dans la revue Roseau d’Or en 1929, et une autre dans la revue Vigile en 1930. Cependant, d’autres petites sélections de pensées ont été publiées quelques années plus tôt en roumain, sous le titre « Cugetări » (Pensées), traduites par l’auteur, en 1907 et 1909, dans les revues Convorbiri literare[30] et Răvașul[31]. Après sa mort, Yvonne Estienne, l’une de ses filles spirituelles, a elle aussi réalisé une sélection de pensées et les a publiées sous le titre Derniers témoignages (1970), elle ont ensuite été traduites en roumain par Doina Cornea (Ultimele mărturii, ed. Dacia, Cluj, 1997). Une autre sélection a été effectuée par Pierre Hayet, mais elle n’a pas été publiée en français, seulement en roumain, toujours dans une traduction de Doina Cornea, sous le titre Fragmente postume (Fragments posthumes) (Ed. Dacia, Cluj Napoca, 2003). Avant la parution de cette traduction, ont été publiés sous le titre « Appels de Dieu », dans le livre intitulé Monseniorul. Amintiri din viața de apostolat (perioada 1939-1954) (Monseigneur. Souvenirs d’une vie d’apostolat – période 1939-1954) 850 pensées en français sélectionnées par Horia Cosmovici (ed. M.C., București, 1996). Le Père Ioan Ciobanu a lui aussi publié des fragments des écrits de Vladimir Ghika, des « pensées » pour la plupart, ainsi que des paroles qui lui sont attribuées, reprises de certaines biographies, sous le titre Gânduri pentru fiecare zi (Pensées pour chaque jour) (première édition en 2002, seconde édition en 2015).
Articles historiques
En 1912, lorsque la Revista Catolică paraît à Bucarest à l’initiative de Mgr Raymond Netzhammer, Vladimir Ghika fait partie des signataires des articles du premier numéro. En fait, il est l’un des contributeurs et a certainement dû assister à la première réunion organisée par Mgr Netzhammer en 1911 lorsqu’il présente le programme de la revue et la liste des contributeurs[32]. Cette revue paraît entre 1912 et 1916 sous les auspices de l’archevêché catholique romain de Bucarest et c’est un magazine qui « s’est imposé dans l’historiographie roumaine grâce à des études scientifiques prestigieuses »[33]. En outre, de par sa parution s’est déclenché « un mouvement culturel au sein de l’Église Catholique »[34]. Vladimir Ghika publie, dans cette revue, dans la période 1912-1914, une série d’articles à caractère historique, qui seront plus tard regroupés dans le livre Spicuiri istorice[35] (Glanages historiques). Ce volume, imprimé en 1935, comprend des articles écrits en roumain et publiés dans deux revues, dans la période 1907-1914. Les articles publiés dans Convorbiri literare et dans Revista Catolică sont d’un caractère spécial, à contenu historique, et sont le résultat des recherches effectuées par Vladimir Ghika aux Archives Vaticanes. Les articles publiés dans la Revista Catolică sont les suivants : « Sultanul Abdul Hamid și Domnii români la Silistra » (le Sultan Abdul Hamid et les princes roumains à Silistra) ; « Arhivele Romane și istoria Românilor » (les Archives romaines et l’histoire des Roumains) ; « O frumoasă și folositoare rugăciune »[36] (Une prière belle et utile) ; « Firmanul de investitură al lui Matei Ghika Vodă (1752) » (le Firman d’investiture du Prince Matei Ghika – 1752) ; « Scrisoarea unui preot catolic pământean din veacul al XVII-lea » (Lettre d’un prêtre catholique local du XVIIe siècle) ; « O petițiune a patriarhilor » (Une pétition des patriarches), publiés dans les numéros de l’année 1912 ; « Hârtii vechi cu lucruri nouă » (Vieux Papiers et Choses nouvelles) ; « Varietăți istorice[37]. O iarnă la Iași 1849 » (Mélanges historiques. Un hiver à Iaşi en 1849), publiés en 1913 ; « Varietăți istorice. O călătorie în Carpați (1849) » (Mélanges historiques. Un voyage dans les Carpates (1849) » ; « Varietăți istorice. Icoane ale vieții românești de ieri, scoase din caietul de studii al unui tânăr fiu de Domn din veacul trecut » (Mélanges historiques. Aspects de la vie roumaine d’hier, extraits d’un cahier d’études d’un jeune fils de Prince du siècle passé), publiés en 1914.
Dans son introduction au volume Spicuiri istorice, qui porte la mention « série I », Vladimir Ghika exprime son intention de publier ces articles « extraits surtout des archives romaines ou des archives familiales », ainsi que son désir de poursuivre ce travail en publiant une nouvelle série d’articles sur des documents relatifs à Grégoire Ghika II (1660-1673), sur les missions catholiques dans les villages moldaves au XVIIe siècle, sur l’assassinat de Grégoire Ghika VII (1777), et un certain nombre de diètes pas encore publiées de mes ancêtres, intéressantes du point de vue à la fois historique, social et psychologique.[38]
Malheureusement, ce volume n’a pas eu de suite, la cause en revenant peut-être aux événements qui ont suivi le déclenchement de la guerre et la persécution communiste, mais aussi l’emploi du temps chargé de Monseigneur Ghika, comprenant de nombreux voyages lorsqu’il était en France, mais aussi après son retour en Roumanie.
Un autre reflet de ses préoccupations historiques se retrouve dans sa contribution à la publication de la correspondance de son père, Ioan Ghika, de la période de la guerre d’indépendance[39]. La réalisation de ce projet est due, d’une part, au travail de Vladimir Ghika, qui a transcrit la correspondance de son père relative à la guerre d’indépendance, à la suggestion de Dimitrie Sturza, et, d’autre part, à un défi de Ioan Brătianu qui regrettait que soit si peu connu le rôle joué à cette époque par Ioan Ghika. Les lettres couvrant la période 1877-1878 sont publiées dans un premier temps. Ce volume, publié par Radu Rosetti, comprend une introduction et des notes.
Vladimir Ghika avait l’intention de publier deux autres volumes présentant des documents ayant appartenu à son père (correspondance, mémoires, rapports, notes, documents officiels)[40]. Un document conservé dans les archives Murgescu en est la preuve.
Certains des articles publiés par Monseigneur Ghika reflètent directement son implication dans le mouvement de renouveau catholique en France, aux côtés d’intellectuels catholiques. Par exemple, la question d’une internationale catholique est débattue lors de la manifestation culturelle catholique « la Semaine des écrivains catholiques », et l’intervention de Vladimir Ghika à cet événement est publiée dans La Documentation française. Cette manifestation se tient avec la bénédiction des Souverains Pontifes Benoît XV et Pie XI. À propos de cette forme d’organisation des écrivains catholiques – créée à l’initiative de Gaëtan Bernoville[41], rédacteur en chef de la revue Les Lettres – qui se réunit plusieurs jours par an depuis 1921, le journal La Croix souligne dans ses pages le déroulement de cet événement. Une mise en garde est publiée en première page du journal en date du 14 juin 1922, précisant que « le devoir de La Croix est de se borner à résumer la doctrine sur laquelle tout le monde doit être et est d’accord et non les aventureuses propositions qui s’y glissent »[42]. Sur la même page les spécificités de cette association sont présentées : « une organisation spéciale où se rencontrent les représentants des nuances diverses de la pensée catholique »[43]. Par ce numéro du journal, nous apprenons que « la Semaine des Écrivains Catholiques » a pour thème le problème de la laïcité, définie comme « l’autonomie du moi et la négation de l’autorité divine, c’est le sens individuel se substituant à l’inspiration de l’Esprit Saint, […] la fin de toute discipline, de tout ordre ». C’est pourquoi les écrivains catholiques doivent réagir contre elle en faisant appel à une raison mieux informée et à une nature mieux connue[44].
Cette association s’est réunie pour la première fois en 1921, au mois de mai. La réunion a été présidée par le cardinal Dubois[45], archevêque de Paris. Son but est d’aider à établir une collaboration loyale et cordiale entre les écrivains catholiques afin de construire la Cité de Dieu. Et l’un des outils pour atteindre cet objectif est l’adoption d’une langue chrétienne. Et même s’il existe des divergences d’opinion, les principes qui les guident seront : un profond respect de l’enseignement officiel de l’Église et une réelle charité pour celui qui a une opinion différente[46]. Vladimir Ghika prend également part à cette première réunion d’écrivains catholiques, comme en témoigne l’annotation portée dans son agenda de 1921 à la date du 22 mai[47]. À cette occasion, un débat a lieu sur la constitution d’une « Internationale catholique ». Sur cette question, Vladimir Ghika prend le parti de Monseigneur Simon Deploige qui est contre une telle organisation. Le discours prononcé par Vladimir Ghika à cet événement est publié dans La Documentation française[48]. Vladimir Ghika plaide, non pour une Internationale Catholique – il soutient que l’organisation internationale des catholiques doit être une organisation catholique, mais pas une internationale – mais pour une œuvre catholique de rapprochement international, pour un rapprochement international des catholiques. Il pense qu’une internationale catholique s’établirait hors des frontières consacrées de l’Église et hors des frontières naturelles des États. Au lieu de cela, il propose une œuvre internationale des catholiques qui aurait pour moyen d’action un organe (d’information, de communication : La Documentation catholique, Les Nouvelles Religieuses) et un centre (créé sur initiative française et basé à Louvain). Vladimir Ghika conclut son discours en disant qu’une telle œuvre d’une élite bienveillante devrait rechercher exclusivement le plus grand bien des nations par l’Église et le plus grand bien de l’Église par les nations, afin de mieux préparer dans l’autre monde, selon le cœur de Dieu, l’épanouissement de l’unique et bienheureuse Cité, de la Cité sans frontières que sera la Cité de Dieu.
Vladimir Ghika participe de nouveau les années suivantes à cette manifestation culturelle catholique. On retrouve en ce sens une note dans son agenda de 1924 pour les journées de début décembre. Il se montre très intéressé par les débats qui ont lieu lors de ces événements, le Père Schorung[49] transcrivant dans l’un de ses cahiers plusieurs documents relatifs à la « Semaine des Écrivains Catholiques », dont le discours sur l’Internationale catholique[50].
Les Conférences
Certaines des conférences données par Monseigneur Ghika paraissent sous forme d’articles dans diverses revues. Les conférences sur la Sainte Vierge, celle de 1904 et celle de 1928, sont publiées dans l’année où elles ont eu lieu. De même, la conférence sur Jeanne d’Arc. La conférence sur Dante devait également être publiée à Louvain.
Vladimir Ghika a donné de nombreuses conférences tant en Roumanie qu’à l’étranger, en France, en Italie, mais aussi dans de nombreux autres pays d’Europe et sur les autres continents qu’il a visités. Sa première conférence, il la donne à Rome, lors d’un congrès marial tenu en 1904 dans l’église des Saints-Apôtres. Son titre est « La Sainte Vierge et l’Orient »[51]. Le fait qu’il s’agisse de sa première conférence, Vladimir Ghika le dit lui-même dans son discours, où nous apprenons qu’il a été invité à parler de la relation entre l’Orient et la Bienheureuse Vierge Marie. Lui-même se décrit comme « fils de l’Orient ». « Je n’ai guère parlé en public ni sur de tels sujets », sont les mots par lesquels il entame ce beau texte qui se veut un « acte de foi », mais qui est aussi un sujet sur lequel il aime parler. Pour lui, cette conférence est un début, sous la protection de Marie. Parlant de la relation existant entre l’Orient et la Sainte Vierge, Vladimir Ghika dit que « l’Orient est comme un poème à la gloire de Marie ». Les principaux thèmes abordés dans cette conférence sont l’unité des Églises, thème qui a toujours préoccupé le Prince Ghika, lui étant un véritable apôtre de l’unité, puis le culte particulier que les croyants orientaux montrent envers la Mère de Dieu, le dogme de l’Immaculée Conception, qu’il considère comme provenant de l’Orient.
Mgr Ghika a toujours montré une dévotion particulière envers la Sainte Vierge. Il lui est profondément lié et c’est pourquoi il en parle à d’autres occasions. En 1927[52], entre les 11 et 18 décembre, la Semaine mariale orientale, placée sous les auspices de la Vierge Consolatrice (Paramythia – icône vénérée au Mont Athos), se tient à Paris. Au cours de cet événement, Monseigneur Ghika donne une conférence, le 13 décembre, au sujet des images de la Sainte Vierge et des lieux de pèlerinage qui lui sont consacrés en Roumanie[53]. Le lendemain, 14 décembre, il célèbre une messe dans le rite byzantin à l’église des Étrangers à Paris. Le texte de cette conférence n’a pas été publié, mais, aux Archives Vladimir Ghika, l’on trouve plusieurs brouillons liés aux icônes miraculeuses de Roumanie et aux lieux de pèlerinage de ce pays. Dans l’un d’entre eux[54] est signalée une coutume qui existait dans le monastère orthodoxe de Ţigăneşti, près de Bucarest, où les 14, 15 et 16 août avait lieu une procession et un office qui reproduisaient ceux de la Semaine Sainte, adaptant à une fête dédiée à la Bienheureuse Vierge Marie les célébrations de la mort et de la résurrection de Jésus[55]. Pour cette même conférence, une liste de 18 lieux de culte a été préparée, accompagnée d’images miraculeuses de la Sainte Vierge, ainsi qu’une autre liste qui regroupe divers lieux de culte et monastères, selon leur saint patron, liés aux fêtes de la Mère de Dieu[56].
Vladimir Ghika a évoqué à plusieurs reprises l’importance du culte de la Sainte Vierge dans l’Église d’Orient. Une autre preuve de son attachement à la Mère de Dieu vient du fait que Monseigneur Ghika a traduit et transcrit pour certains de ses amis des vers de l’Acathiste, hymne qui aurait été composé par Romain le Mélode au VIe siècle, hymne que l’Église catholique recommande aux fidèles avec le Rosaire, l’autre dévotion qui s’adresse à la Vierge Marie.
Une autre conférence importante sur le lien existant entre la Sainte Vierge et la Sainte Eucharistie, intitulée « La Sainte Vierge et le Saint Sacrement », est donnée par Monseigneur Ghika en 1928 au Congrès eucharistique de Sydney[57].
En 1921, il donne une conférence sur Dante à Louvain : « Autour d’un centenaire 1321-1921: La Philosophie des centenaires – L’Actualité de Dante. Dante et le péché contre les étoiles »[58]. Cette conférence devait être publiée sous forme d’article. En 1923 Simon Deploige propose à Vladimir Ghika de publier l’article dans la Revue catholique des idées et des faits[59]. En fait, Vladimir Ghika a l’intention d’écrire une œuvre du genre de la Divine Comédie de Dante. Et une partie importante des pensées qu’il nous a laissées pourrait être regroupée dans ce qui constituerait le chapitre consacré à l’Enfer. Vladimir Ghika commence sa réflexion en se demandant, à propos de Dante, si, à sa mort, le poème de sa vie était dans un meilleur état de perfection et de finition que celui qui l’avait écrit, puis fait une analogie avec la Divine Comédie en disant qu’au moment de la mort, ce qui est en jeu, c’est la Divine Tragédie, « celle dont chacun est fatalement auteur et acteur, celle qui ne veut pas connaître d’autre génie que la grâce de Dieu et la vertu de l’homme ». Une autre question que se pose Monseigneur Ghika est de savoir si toutes les accusations contre autrui ne condamneront pas leur auteur. Il constate également dans quelle situation redoutable se trouvent ces œuvres constituées en dignité, des sentences prononcées contre les créatures humaines, des sévérités immortalisées.
En 1924 il parle de Jeanne dʼArc lors d’une conférence[60]. Vladimir Ghika a réalisé plusieurs dessins représentant l’héroïne française. Parmi les documents qui nous sont parvenus de Vladimir Ghika l’on en trouve un intitulé « “Jeanne dʼArc au théâtre. 1439-1875” par le Cte de Puymaigre. Extrait du Correspondant ». Il s’agit en fait d’un article signé par Théodore-Joseph Boudet de Puymaigre[61] et publié dans la revue Le Correspondant en 1875. Vladimir Ghika avait en sa possession un extrait de cet article sur les différentes représentations dramatiques ayant Jeanne dʼArc comme personnage principal. L’auteur de l’article mentionne le grand nombre d’écrits de types différents et de spectacles divers qui ont pour sujet la vie de cette héroïne française. Il dit au début de l’article qu’aucun autre personnage n’a inspiré autant de pièces que Jeanne d’Arc. En France, à cette époque, en 1875, 40 écrits l’ont pour héroïne. Jeanne dʼArc s’est vue déclamer tant de la prose dramatique que des alexandrins tragiques, en passant par les vers des livrets dʼopéra. Elle joue de la pantomime, court dans le cirque et fredonne des airs de vaudeville[62]. L’extrait que possédait Vladimir Ghika portait sur une tragédie écrite par un Luxembourgeois du nom de Nicolas Vernulaeus ou Vernulz en 1629, portant sur l’histoire de Jeanne d’Arc. La particularité de cette pièce est qu’elle a été écrite en latin. L’auteur de l’article fait une description détaillée de cette pièce. Il considère que Vernulaeus attribue à Jeanne d’Arc des discours très exaltés qui ne correspondent pas à son caractère et une emphase qui imite les poètes classiques. Mais il ajoute aussi quelques détails secondaires qui contribuent à la véracité de sa tragédie. Autres particularités de cette œuvre : chaque acte se termine par un refrain, et celui de la fin de la pièce, chanté par les jeunes filles de France, est tout à fait remarquable ; la présence à chaque scène d’un personnage nommé Senex et qui ne prononce généralement que quelques phrases sentencieuses. Vladimir Ghika semble avoir été frappé par la présentation de cette pièce du XVIIe siècle par le comte de Puymaigre. Il est significatif qu’il ait conservé cette coupure.
Un autre document attestant l’intérêt de Vladimir Ghika pour Jeanne d’Arc est un texte signé de Gabriel Hanotaux dans lequel est présenté le lien existant entre Jeanne d’Arc et les ermites Augustiniens. L’on dit qu’ils étaient les compagnons habituels de Jeanne d’Arc, qu’il y avait un monastère de ces ermites Augustiniens à Maxey près de Domrémy, lieu d’origine de Jeanne d’Arc. L’un de ces frères, le Frère Pasquerel, fut son confesseur et l’accompagna de Chinon jusqu’à sa mort. C’est aussi lui qui témoigna en faveur de sa réhabilitation. Une autre information apportée par ce texte est liée à la réhabilitation de Jeanne d’Arc menée par le cardinal d’Estouteville, archevêque de Rouen, grande personnalité du XVe siècle et protecteur des ermites Augustiniens. L’auteur du texte propose d’explorer les archives du cardinal se trouvant à Rome, où pourraient être découvertes des traces de ses convictions et de sa politique favorable à Jeanne d’Arc. Le cardinal d’Estouteville joua un rôle important dans le rapprochement du Saint-Siège avec la France[63].
En 1924, Vladimir Ghika reçoit un bulletin d’adhésion du Comité d’Initiative pour l’érection d’une basilique votive en l’honneur de Sainte Jeanne d’Arc. Celle-ci a été canonisée en 1920[64] par le Pape Benoît XV et, en 1922, le Pape Pie XI l’a nommée sainte patronne de la France. Cette lettre demande à Vladimir Ghika de se joindre à d’autres personnes qui ont déjà exprimé leur adhésion, comme Henry Bordeaux[65], René Bazin[66], Georges Goyau[67], Gabriel Hanotaux[68] et beaucoup d’autres. L’initiative vient d’une lettre pastorale envoyée par le Cardinal Dubois, archevêque de Paris, dans laquelle il encourage les fidèles à élever une église en l’honneur de Jeanne dʼArc[69]. Il y avait, de fait, un sens à une telle construction en 1914, alors que Paris était menacé par les troupes allemandes[70].
Dans sa conférence sur Jeanne dʼArc intitulée Place et rôle de Sainte Jeanne d’Arc entre nous et le ciel[71], Vladimir Ghika dit qu’il va la laisser parler elle-même « car elle a eu, dans sa courte existence, dans sa vie publique réduite à si peu de durée, des paroles de mission et de passion d’une plénitude de sens sans égale »[72].
Vladimir Ghika dit qu’il va essayer de mieux comprendre le rôle nouveau que va désormais jouer la jeune sainte, « avec la qualité nouvelle que lui donne, urbi et orbi, l’affirmation solennelle de l’Église de Dieu »[73]. De la vie de Sainte Jeanne d’Arc Vladimir Ghika tire plusieurs enseignements qu’il transmet et développe progressivement. D’abord la formule « Dieu premier servi ! », puis les réalités surnaturelles dont nous devons tenir compte et sur lesquelles nous devons nous appuyer pour mieux remplir nos devoirs en ce monde ; le remède contre une foi hésitante, un esprit étroit, un amour faible. Jeanne d’Arc est la patronne de ceux qui s’exposent et donnent leur vie pour un devoir noble et dur. Elle est la sainte du sacrifice total pour le bien commun[74]. C’est la sainte justice des nations. Elle a le sens de la loi éternelle qui doit régner entre les peuples et les nations et entre les individus[75]. Elle voit, dans la nation, « la personne morale sur qui veille une garde angélique, l’espèce d’âme collective mystérieuse […], à qui Dieu donne un rôle, au cours des siècles, qu’il conduit et qu’il protège d’une volonté particulière ». Jeanne dʼArc, quoique « vouée à une tâche de lutte nécessaire mais déplorée entre nations, voit, pour les nations, des tâches communes et sacrées, faites pour les hommes et pour le bonheur de l’humanité ». Elle est la sainte de la Patrie, de sa Patrie ; elle est la sainte d’un drapeau, « quarante fois préféré à l’épée même qui le protège »[76]. C’est la sainte du devoir civique[77], du rôle héroïque de la femme, patronne et rectificatrice d’un féminisme devenu chose forcée. Vladimir Ghika la donne comme exemple pour ce qu’il dénomme le « Saint travail professionnel du foyer » (parce qu’elle sait coudre et tisser) et pour le « sacerdoce domestique » (parce qu’elle a été initiée à la foi chrétienne par sa mère). Un autre enseignement transmis par Jeanne dʼArc est « d’être prêt à remplir tous les devoirs plutôt qu’à exiger tous les droits », ainsi que celui de bien utiliser son temps, chose d’autant plus vraie dans les missions publiques[78]. Vladimir Ghika explique ainsi que « l’homme de bien sent qu’il n’est jamais une fin en soi !, un chef d’œuvre au repos, mais un instrument, un exécuteur limité de tâches qui le dépassent ». Jeanne dʼArc est la sainte de la vigilance, de l’initiative sans ambition, sans retour sur soi-même. Elle est la sainte de la reconnaissance[79]. Elle possède la notion d’universalité chrétienne et le sens national. Elle possède aussi un sens surnaturel concernant les deux Églises, l’une triomphante et l’autre militante. Parant de l’importance de cette sainte, Vladimir Ghika parle également de la mission providentielle des pays[80], de la vocation nationale très visible. Et dans cet ordre d’idée, il affirme qu’il existe des peuples façonnés pendant des siècles pour une mission voulue par Dieu. Ensuite, Vladimir Ghika dit que tout le passé de la France lui trace un apostolat que celle-ci doit poursuivre dans le monde. Il rappelle les noms des saints et des saintes de ce pays[81]. Et, vers la fin, il dit :
L’héroïsme n’est pas, chez vous, une vertu d’occasion ; […] C’est déjà pour vous une habitude, et plus qu’une habitude – un don. Mettez-le en œuvre sur d’autres terrains sur le champ de bataille, avec le même entrain, la même persévérance, le même succès[82].
Toujours en 1924, le 12 décembre, à l’occasion de l’assemblée générale des Dames de Charité, Monseigneur Ghika, après avoir célébré la messe, prononce aussi une allocution qui sera publiée l’année suivante[83].
Vladimir Ghika toute sa vie est resté lié à la spiritualité byzantine[84]. Étant prêtre birituel, il célèbre souvent la messe en rite oriental, rite qu’il essaye de faire mieux connaître par des conférences et en présentant à diverses occasions sa structure et sa spiritualité. La presse de l’époque rapporte ainsi différents événements auxquels il prend part, événements liés à la liturgie orientale ou à la spiritualité byzantine, à l’occasion desquels il intervient sur ces thèmes et célèbre souvent en rite grec[85]. Il traduit en français et publie la « Messe de Saint Jean Chrysostome », qui connaît plusieurs rééditions, messe qu’il célèbre souvent à la Maison des Frères et Sœurs de Saint Jean d’Auberive[86].
Dans une conférence intitulée « Physionomie spirituelle de la messe orientale »[87], il se réfère strictement à l’Église d’Orient et non à l’Église Unie à Rome, car il considère que l’Église Orthodoxe a mieux conservé certaines particularités de la liturgie. Vladimir Ghika justifie le titre choisi pour sa conférence en disant que la messe orientale elle-même présente une atmosphère mystique, et que cette mystique est aussi caractéristique des gestes liturgiques des fidèles. Ensuite, dans sa conférence, se rapportant au thème traité, il attire l’attention sur le fait qu’il s’agit d’une messe « non point un objet d’érudite curiosité, mais quelque chose de sacré et de redoutable, le trésor vivant ». Et la perspective à partir de laquelle il aborde le sujet se veut être « l’optique de Dieu », qu’il espère, avec l’aide de Dieu, comprendre ou au moins découvrir. Vladimir Ghika souligne l’importance de la liturgie qui modèle qui façonne depuis tant de siècles des millions d’âmes. La messe est un « lien qui assure l’unité des fidèles dans l’espace et le temps », un « instrument d’union à Dieu, source inépuisable de prière »[88].
En 1931, Vladimir Ghika est nommé protonotaire apostolique. La même année, ont lieu à Paris, entre le 30 avril et le 3 mai, les « Journées liturgiques », ayant pour thème général « l’Instruction des fidèles et leur participation au culte divin ». Le 30 avril, Vladimir Ghika tient une conférence sur « la Participation des fidèles orientaux au culte divin »[89]. Sur un brouillon consacré à la messe byzantine[90] ont été conservées quelques idées à ce sujet. Vladimir Ghika est d’avis que, dans la liturgie byzantine, la distance entre le prêtre et les fidèles est beaucoup plus marquée que dans la messe latine, mais il considère par contre que, dans la messe byzantine, la participation des fidèles est plus directe[91].
À l’occasion du Congrès Eucharistique International de Buenos Aires en 1934, Mgr Ghika parle du chant grégorien et du chant oriental[92]. Affirmant la puissance moralisatrice et spirituelle du chant dans l’Église, Vladimir Ghika considère que, dans l’Église d’Orient, le chant offre un cadre propice au recueillement.
Dans ses conférences, Vladimir Ghika aborde, comme on l’a vu, des thématiques comme le rôle de la Sainte Vierge, la liturgie et la spiritualité byzantines, le chant liturgique. Il a également donné une conférence sur Jeanne dʼArc en 1924. De même, après sa participation aux congrès eucharistiques, il tient des conférences sur ce sujet[93]. Il faut également signaler les conférences qu’il a données à Bucarest, après son retour au pays, sur diverses personnalités, notamment des écrivains comme Jacques Maritain (1939), Paul Claudel (1939), Panait Istrati (1938 et 1943)[94]. Il faudrait encore mentionner ses conférences sur l’histoire de l’Église. Sur ce thème, l’on a conservé de Vladimir Ghika un brouillon intitulé « Histoire de lʼÉglise », texte qui a été traduit en roumain, signe que cette conférence a également été prononcée en Roumanie[95]. En 1923, un Cercle d’Études d’Histoire de l’Église a été constitué à destination des étudiantes de l’Institut Catholique de Paris, cercle présidé par Vladimir Ghika. Le 19 décembre a lieu la cérémonie d’ouverture de ce cercle. Une première conférence aurait dû être donnée le 16 janvier de l’année suivante, mais elle a été reportée, Vladimir Ghika étant malade. La conférence est donnée le 30 janvier. Les réunions de ce Cercle vont se succéder les mois suivants à un rythme assez irrégulier, Vladimir Ghika étant alors assez souffrant. Le 7 mai a lieu la dernière réunion du Cercle.
L’apostolat intellectuel a caractérisé une partie importante de la vie de Vladimir Ghika, tant en France qu’en Roumanie, mis en relief par ses relations avec les écrivains et les philosophes, mais aussi par les efforts qu’il fait pour transmettre aux jeunes chercheurs de vérité une doctrine solide et documentée. Vladimir Ghika a également exercé un apostolat de l’écrit, en utilisant tant la presse que l’édition afin de soutenir certaines idées et offrir des moyens appropriés pour répandre les vérités de la foi. Mais, après son ordination, l’apostolat sacerdotal est passé au premier plan et c’est pourquoi il n’a pas finalisé certains projets de départ, comme par exemple son immense collection de « Pensées », dont il n’a publié qu’une partie, mais qu’il nous a laissé en héritage, ou encore d’autres écrits comme sa pièce de théâtre intitulée Barrabas, la seconde partie des Spicuiri istorice, ou la seconde partie de la Souffrance, quelques textes sur la messe byzantine et le chant grégorien, restés non publiés. L’apostolat sacerdotal lui a fait délaisser le dessin, art dans lequel il avait montré tant de talent, et si ses biographes ont naturellement insisté sur son œuvre principale qu’a été sa vie au service du prochain, il ne faut pas oublier son œuvre écrite publiée et, peut-être surtout, son œuvre non publiée.
[1] Il s’est rendu sur presque tous les continents. Il a effectué deux voyages au Japon, en 1933 et 1936-1937. Le fait qu’il était membre du Comité Permanent des Congrès Eucharistiques Internationaux lui a permis d’assister aux Congrès Eucharistiques tenus à Sydney en 1928, Carthage en 1930, Dublin en 1932, Buenos Aires en 1934, Manille en 1937, Budapest en 1938.
[2] Cf. « Appel du Comité International de lʼŒuvre de Louvain », in Journal des débats politiques et littéraires, an 131, n° 202, 22.07.1919, 1-2.
[3] Ibidem, 1-2.
[4] Ibidem, 2.
[5] L’Université de Louvain ainsi que la bibliothèque avaient été détruites par un incendie provoqué par des soldats allemands qui détruisirent en grande partie la ville le 26 août 1914. Le cardinal Mercier notait dans sa lettre pastorale après cet événement : « notre riche bibliothèque, avec ses collections, ses incunables, ses manuscrits inédits, ses archives (…) toute cette accumulation de richesses intellectuelles, historiques, artistiques, fruit de cinq siècles de labeur, tout est anéanti… » (« Le sac et l’incendie de Louvain par les Allemands, 26 août 1914 » : http://1914ancien.free.fr/louvain.htm, consulté le 27.04.2016).
[6] Étienne Lamy (1845-1919), avocat, journaliste et homme politique français, secrétaire perpétuel de l’Académie Française.
[7] Pierre Imbart de La Tour (1860-1925), historien français.
[8] Simon Deploige (1868-1927) a été ordonné prêtre en 1896 et est devenu, en 1912, prélat domestique du Pape. Il a été envoyé en mission diplomatique au Vatican (1914/1915) et en Espagne (1915-1916).
[9] Ils se sont rencontrés pour la première fois l’année même de l’incendie, en 1914.
[10] Désiré Joseph Cardinal Mercier (1851-1926), cardinal belge.
[11] Lettre du Cardinal Mercier à Vladimir Ghika, 30.01.1920, Archives Vladimir Ghika – ARCB.
[12] « Autour dʼun Centenaire. 1321-1921. La philosophie des Centenaires. LʼActualité de Dante. Dante et le péché contre les étoiles », brouillon de la conférence, manuscrit, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[13] Cf. René Rémond, Jacques Julliard, Daniel Lindenberg, « L’histoire des intellectuels catholiques. Interview de René Rémond », in Mil neuf cent, n° 13, 1995, 14-15 (http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ mcm_1146-1225_1995_num_13_1_1129).
[14] Ibidem, p. 15.
[15] Ibidem, p. 16.
[16] Ibidem.
[17] Lors de son séjour en Roumanie, il semble que Vladimir Ghika ait copié des milliers de « pensées » écrites au cours de sa vie, qu’il a probablement voulu publier. Mais il n’a pas réussi à mener à bien ce projet.
[18] Vladimir Ghika, « Dans les régions dévastées. Mont Renaud, Noyon, Chauny, Jussy. Feuilles dʼun carnet de voyage », in Le Correspondant, 25.09.1917, 1000-1025.
[19] Vladimir Ghika, « LʼÉglise et la nouvelle Roumanie », in La Revue des Jeunes, n° 6, 1921, 646-665.
[20] Vladimir Ghika, « Autour du drame de Sarajevo. Les origines de la guerre », in La Revue Universelle, t. V, n° 2, 15.04.1921, 129-141.
[21] Vladimir Ghika, « Pages mensuelles de spiritualité », in La Croix, 1.06.1922, 4.
[22] Vladimir Ghika, « Une conquête de la philosophie chrétienne. Jacques Maritain », in La Documentation Catholique, n° 216, 27.10.1923, col. 643-660.
[23] Vladimir Ghika, « Lʼâme dʼune cérémonie. La solennité du 26 mars 1917 à Paray-le-Monial », in La Revue hebdomadaire, an 26, n° 27, 7.07.1917, 22-41.
[24] Vladimir Ghika, « Le Trois mars », in Le Monde Catholique illustré, an IV, n° 5, 15.03.1902, 129‑133.
[25] Vladimir Ghika, « LʼInternationale catholique », in La Documentation française, n° 109, 21-28 mai 1921.
[26] Sous le titre « Informations » est publiée une recension par Vladimir Ghika du livre LʼUnité de LʼÉglise, les Églises séparées dʼOrient et la Réunion des Églises, publiée par Charles Quénet. Vladimir Ghika, « Informations », in Revue apologétique, 1.02.1924, 565-567.
[27] Baba Novak, « Un nou apostat », in Epoca, anul VIII, nr. 2017 – 115, 1 mai 1902, 1.
[28] Vladimir Ghika, « Nu apostat, ci apostol », 18-21 mai 1902, projet de lettre de réponse adressée au directeur du journal Epoca, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[29] Cf. Iulia Cojocariu, « Vladimir Ghika despre Viața lui Isus de Giovanni Papini » (Vladimir Ghika sur la Vie de Jésus de Giovanni Papini), in Actualitatea creștină, nr. 10, 2015, 20-21, ici 20.
[30] Revue littéraire mensuelle paraissant à Iaşi, Convorbiri literare fut l’organe de presse de la Société littéraire Junimea. Le premier numéro est paru le 1er mars 1867.
[31] Hebdomadaire illustré paraissant à Cluj dans les années 1903-1910.
[32] Dănuț Doboș, « Contribuții la istoriografia românească. Revista Catolică (1912-1916) » (Contributions à l’historiographie roumaine. la Revista Catolică (1912-1916)), in Pro Memoria. Revistă de istorie ecleziastică, nr. 3, 2004, 85-102, ici 88.
[33] Ibidem, 86.
[34] Ibidem.
[35] V. Ghika, Spicuiri istorice (Glanages historiques), seria I, Ed. Presa Bună, Iași, 1935.
[36] L’article contient une prière du pape Clément XI que Vladimir Ghika traduit en roumain. Il présente également une notice biographique de son auteur. La prière porte la mention : « sur tout ce qui est utile au salut, composée par Clément XI Pape de Rome (1700-1721) ».
[37] Sous le titre « Mélanges historiques », Vladimir Ghika a publié une série de trois articles sur des notes prises par son père dans sa jeunesse (il avait alors 14-18 ans) dans un cahier dans lequel il a découvert « des pages qui ont une certaine valeur documentaire et historique pour des temps pas si éloignés de nous » et auxquelles il attribuait aussi certains mérites littéraires.
[38] Vladimir Ghika, introduction aux Spicuiri istorice, seria I, Ed. Presa Bună, Iași, 1935, f. p.
[39] Radu Rosetti, Corespondența generalului Iancu Ghica, 2 aprilie 1877 – 8 aprilie 1878 (Correspondance du général Iancu Ghica, 1 avril 1877-8 avril 1878), Ed. Cartea Românească, București, 1930.
[40] Vladimir Ghika, brouillon [Je m’étais livré], Archives Murgescu, sous format électronique aux Archives Vladimir Ghika – ARCB.
[41] Gaëtan Bernoville (1889-1960), journaliste, fondateur de la revue Les Lettres, secrétaire de la « Semaine des Écrivains Catholiques », directeur de la collection « l’Église du temps présent ».
[42] La Croix, 14 juin 1922, 1.
[43] Ibidem.
[44] A. M., « La semaine des écrivains catholiques », in La Croix, 14 juin 1922, 2.
[45] Le Cardinal Louis Ernest Dubois (1856-1929), archevêque de Paris de 1920 à 1929. C’est lui qui a ordonné prêtre Vladimir Ghika, le 7 octobre 1923.
[46] Jean Guiraud, « La semaine des écrivains catholiques », in La Croix, 24 mai 1921, 1.
[47] Agenda de Vladimir Ghika pour 1921, Archives Murgescu, sous format électronique aux Archives Vladimir Ghika – ARCB.
[48] « L’Internationale Catholique. Exposé du Prince Wladimir Ghika » in La Documentation française, n° 109, 21-28 mai 1921.
[49] Georges Schorung (1893-1980), prêtre Lazariste. Il a été ordonné la même année que Mgr Ghika. Le 6 octobre il a été reçu dans la Congrégation de la Mission et, le lendemain, il a assisté à l’ordination de Vladimir Ghika. En 1931, il a commencé sa mission à la chapelle du Sacré-Cœur de Bucarest, où il est resté en poste jusqu’en 1950, date à laquelle il a été expulsé de Roumanie. Fasciné par la figure de Mgr Ghika, il a consacré les quelque 30 années qui lui sont restées de vie à recueillir, transcrire et ordonner les documents qui concernaient le prince roumain en vue de publier une biographie mais aussi d’ouvrir un dossier de béatification.
[50] Schorung, c. XXVIII, 97-101, 187-205, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[51] Vladimir Ghika, « La Sainte Vierge et l’Orient », in Atti del Congresso Mariano mondiale, Roma, 1904, 152-159.
[52] Cf. pliant Semaine mariale orientale, 11-18 décembre 1927, 4 p., Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[53] Le texte de ce paragraphe est repris de « Vladimir Ghika – scurtă biografie » (Vladimir Ghika – brève biographie), publié dans Claudia Stan, Vladimir Ghika. Un catolic ortodox (Vladimir Ghika. Un catholique orthodoxe), Ed. ARCB, București, 2014, 10-16, ici 14-15.
[54] Vladimir Ghika, [Légende du jardin], brouillon original, 7 pages, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[55] Ibidem, 3.
[56] Ibidem, 6-7.
[57] Le texte de la conférence a été publié dans Élisabeth de Miribel, la Mémoire des silences, Fayard, Paris, 1987.
[58] Conférence à l’Institut Supérieur de Philosophie de Louvain. Voir l’annexe au texte de la conférence.
[59] Cf. Lettre de Simon Deploige à Vladimir Ghika, 19.03.1923, Archives Vladimir Ghika – ARCB.
[60] Publiée en 1924 sous le titre « Place et rôle de Sainte Jeanne d’Arc entre nous et le ciel » dans le Bulletin de la Société générale dʼéducation et dʼenseignement. La conférence apparaît mentionnée brièvement Conférence sur Jeanne d’Arc dans l’agenda de l’année 1924, les 9 et 10 mars. La notice du 10 mars est accompagnée d’un point d’interrogation. De la correspondance entretenue avec son frère Démètre, nous apprenons qu’une conférence a été interrompue. Il s’agit probablement de celle du 10 mars (Agenda de Vladimir Ghika pour 1924, Archives Murgescu ; sous format électronique aux Archives Vladimir Ghika – ARCB ; Lettre de Démètre Ghika à Vladimir Ghika du 18 mars 1924, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika).
[61] Comte de Puymaigre, « Jeanne dʼArc au théâtre. 1439-1875 », in Le Correspondant, vol. 101, 1875, 984-1013.
[62] Ibidem, 984.
[63] Gabriel Hanotaux, « Jeanne dʼArc et les Ermites de St Augustin », Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[64] Jeanne d’Arc a été béatifiée le 11 avril 1909 et canonisée le 16 mai 1920.
[65] Henry Bordeaux (1870-1963), avocat, romancier et essayiste français.
[66] René Bazin (1853-1932), écrivain, professeur de droit, journaliste, essayiste, historien et mémorialiste français.
[67] Georges Goyau (1869-1939), historien et essayiste français, spécialiste de l’histoire religieuse.
[68] Gabriel Hanotaux (1853-1944), diplomate, historien et homme politique français.
[69] « Érection de la Basilique votive de Sainte Jeanne dʼArc. Comité dʼinitiative », lettre adressée à Vladimir Ghika, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[70] Cette basilique sera consacrée en 1964 par le Cardinal Feltin. La première pierre a été posée en 1929, mais la construction rencontrera diverses difficultés au fil du temps, et le projet initial a été abandonné et simplifié à un moment donné. Cf. J. de La Ville Baugé, « La Basilique Sainte Jeanne d’Arc à Paris », 5.04.2012 : http://www.amis-jeanne-darc.org/index.php?option= com_content &view=article&id=212:la-basilique-sainte-jeanne-darc-a-paris&catid=45: monuments&Itemid=79, consulté le 10.02.2016.
[71] Place et rôle de Sainte Jeanne dʼArc entre nous et le Ciel. Conférence prononcée par le prince Vladimir Ghika, Procure de la Transfiguration, Mérigny, 2004, 9-24.
[72] Ibidem, 11.
[73] Ibidem, 12.
[74] Ibidem, 14.
[75] Ibidem, 15.
[76] Ibidem, 16.
[77] Ibidem, 17.
[78] Ibidem, 18.
[79] Ibidem, 19.
[80] Ibidem, 20-21.
[81] Ibidem, 22.
[82] Ibidem, 24.
[83] Annales de la congrégation de la Mission (Lazaristes) et de la compagnie des Filles de la Charité, n° 90 – 1925, 251-260.
[84] Pour une partie de ce sous-chapitre, l’on a utilisé le fragment « Vladimir Ghika – scurtă biografie », publié dans Claudia Stan, Vladimir Ghika. Un catolic ortodox, Ed. ARCB, București, 2014, 10-16, ici 12-16.
[85] Par exemple, dans le Journal des débats politiques et littéraires du 4 décembre 1925, sont annoncées la célébration d’une messe byzantine et la tenue d’une conférence sur la liturgie byzantine dans le cadre d’événements organisés pour marquer les 1600 ans du Concile de Nicée (« Pour lʼunion des Églises », in Journal des débats politiques et littéraires, n° 336, 4.12.1925, 4). Une messe de rite byzantin est annoncée dans l’article signé Jacques Galédon, « La Semaine mariale et orientale », in Le Gaulois, n° 18328, an 62, 10.12.1927, 2. Dans le journal La Croix du 20 janvier 1931 est annoncée la célébration d’une messe byzantine par Vladimir Ghika, dans le cadre de l’octave de prière pour l’unité de l’Église (« Pour lʼunité de lʼÉglise », in La Croix, an 52, n° 14690, 20.01.1931, 2).
[86] Vladimir Ghika, La Messe byzantine dite de Saint Jean-Chrysostome, 3ème édition, Desclée de Brouwer et Cie, Paris, 1933.
[87] Vladimir Ghika, « Physionomie spirituelle de la messe orientale », manuscrit original, 9 pages, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[88] Ibidem, 1.
[89] « Les Journées Liturgiques de Paris », in La Croix, 02.05.1931, 2.
[90] Vladimir Ghika, « La Messe orientale », manuscrit original, 9 pages, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[91] Ibidem, 6.
[92] Vladimir Ghika, « Notes sur le chant grégorien et le chant oriental » – transcription Georges Schorung, c. XXIV, 38, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
[93] Par exemple, 14 novembre 1928 et 22 septembre 1935, conférences sur le Congrès de Sydney ; 21 février 1935, sur le Congrès de Buenos Aires ; 13 et 19 juin 1938, sur le Congrès de Budapest (cf. Agendas 1928, 1935, 1938, Archives Murgescu, sous format électronique aux Archives Vladimir Ghika – ARCB).
[94] Cf. Agendas 1938, 1939, 1943, Archives Murgescu, sous format électronique aux Archives Vladimir Ghika – ARCB.
[95] Sur un document accompagnant le texte dactylographié d’une partie de la conférence en roumain, Oana Seceleanu donne des informations sur le fait que cette conférence a été prononcée dans la cadre de l’Association ASTRU (Association des Étudiants Roumains Gréco-Catholiques), à l’église gréco-catholique de la rue Polonă à Bucarest, le 20 juillet 1946. [Trebuie dacă vrem să studiem bine], 1, Archives Vladimir Ghika – ARCB, Fonds Institut Vladimir Ghika.
Articol publicat în traducere, în revista Pro Memoria, nr. 17-18 / 2018-2019, p. 171-204.