Les Archives Vladimir Ghika de Bucarest conservent peu de documents qui évoquent cet épisode de la vie de Vladimir Ghika qu’est la création de la légion roumaine d’Italie, en 1918. Juste quelques allusions par-ci par-là.
Elles possèdent cependant un brouillon de lettre adressée au Roi Ferdinand, datant sans doute de mai 1918 et dont voici un extrait : « Je suis (…) à une croisée de chemins et, tout en étant prêt à faire ce qui sera le mieux pour mon pays, je me trouve sur le point de choisir irrévocablement entre plusieurs partis. Celui qui semble prévaloir en ce moment et qui, si je ne suis arrêté chaque jour plus souvent dans l’engrenage où il m’entraîne, par l’appel à la représ[entation] dipl[omatique] près le S[aint] S[iège] ici souhaitée, risque de m’amener à des extrémités d’où je ne pourrais revenir, c’est le suivant, en compagnie de q[uel]ques bons Roumains j’ai initié des démarches, déjà avancées, pour la création d’une Légion Roumaine sur le front italien avec des Trans[ylvains] et des élém[ents] de R[oumanie] adjointe en francs-tireurs et en enfants perdus. Si je prends une telle décision, je ne pourrais être à la fois le centre avoué du mouvement irrédentiste, les armes à la main et le représentant dipl[omatique] d’un pays revenu malgré lui sans doute mais en fait revenu officiellement à la neutralité. – Il m’importerait donc d’être fixé sans retard sur le point de savoir comment je puis mieux servir notre cause[1]. »
Il semble donc que Vladimir Ghika hésitait, en cette première moitié de l’année 1918, entre une proposition de devenir le représentant de la Roumanie auprès du Saint-Siège[2] et sa volonté de pousser à la création d’une Légion de volontaires roumains en Italie. Tâches alors incompatibles puisque le rôle d’ambassadeur aurait été une collaboration avec un gouvernement roumain alors dominé par les germanophiles, tandis que la création d’une légion de combattants irrédentistes roumains aurait été un acte hautement hostile à l’Allemagne.
Un ouvrage qui vient d’être publié lève un peu le voile sur le rôle qu’a pu jouer Vladimir Ghika dans la création d’une Légion de volontaires roumains en Italie en 1918. En effet Dumitru Zaharia a réuni et commenté un certain nombre de documents publiés sous le titre Legiunea Română din Italia : documente italiene[3] (la Légion roumaine d’Italie : documents italiens). Or le nom de Vladimir Ghika apparaît à de nombreuses reprises dans ces documents. Nous allons ici tenter de retracer les étapes de la participation de Vladimir Ghika à ce projet, grâce aux documents publiés par Dumitru Zaharia, mais aussi à l’aide de ceux conservés aux Archives Vladimir Ghika de Bucarest.
Pourquoi cette initiative de créer une légion roumaine ? et pourquoi à ce moment-là ? Il faut préciser qu’ayant été forcée de signer la paix séparée de Buftea avec les Puissances Centrales (le 7 mai 1918) du fait de la cessation des hostilités de la part des forces russes, conséquence de la volonté des Bolcheviques de faire la paix avec l’Allemagne, la Roumanie est sortie du conflit, or, du fait de cette situation, elle risque de se voir refuser par les Alliés toutes les promesses, notamment territoriales en vue de la création de la Grande Roumanie, qui lui avaient été faites au moment de son entrée en guerre à l’été 1916. Maintenir un semblant d’armée roumaine dans le conflit, ce serait donc maintenir vivants les intérêts roumains. Et cette demande ne peut provenir du gouvernement roumain puisqu’il veut s’attirer les bonnes grâces de ses vainqueurs, mais l’initiative ne peut venir que des Roumains exilés.
C’est ainsi qu’est formé en Italie le Comité pour l’Unité Roumaine, dont voici l’acte de fondation : « Les soussignés, nous avons jugé qu’il convenait de constituer un organe représentant des intérêts communs à tous les Roumains, aussi bien à ceux de la monarchie Austro-Hongroise qu’à ceux du royaume, Dobroudja et Bessarabie comprises. Le Comité pour l’Unité Roumaine que nous constituons par cet acte et qui s’accroît des compétences et des bonnes volontés notoires est destiné à créer, entre champions d’une même cause, le contact indispensable à une action raisonnée et totale. Il a pour attribution de grouper et de concentrer toutes les initiatives ayant pour but l’émancipation et la fusion des éléments roumains subjugués, où qu’ils se trouvent, de ramener[4] aux tentatives faites en ce sens jusqu’ici de façon isolée ou sporadique, et de faire rentrer toutes ces manifestations dans le cadre de l’organisation générale du mouvement pour l’unité nationale de tous les Roumains. Le Comité pour l’Unité Roumaine a été fondé à Rome, le 18 juin 1918[5], et comprend pour le moment : le professeur Simeon Mândrescu, le prince Vladimir Ghika, le lieutenant prince Michel Stourza. » Simion Mândrescu est un professeur d’université et Mihai Sturdza un officier d’artillerie, parent de Vladimir Ghika.
Et c’est ainsi que les deux premiers des trois seuls membres de ce Comité se présentent ce même 18 juin 1918 au sous-secrétariat italien pour la Propagande Extérieure afin d’exposer leur plan de levée d’une Légion de volontaires parmi les prisonniers de guerre transylvains. Voici le compte-rendu de cet entretien tel que rapporté par l’officiel italien du ministère de la Propagande, du nom de Gallenza, qui les a reçus : « Les requêtes adressées par les susnommés M. Ghika et le professeur Mândrescu pourraient être résumées de la manière suivante : 1) libération immédiate des officiers prisonniers de nationalité roumaine et que leur soit accordée la permission de faire de la propagande parmi la troupe ; 2) séparation des prisonniers de cette nationalité de ceux des autres, en les regroupant dans des camps spéciaux ; 3) les officiers roumains qui ne seront pas occupés dans les services de propagande parmi les soldats seront utilisés comme hommes d’information dans l’intérêt des différentes armées ; 4) dans le but d’organiser la Légion Roumaine, que soient assurés les fonds nécessaires parmi ceux alloué à l’activité de propagande (…). »[6]
Mais trois hommes, de bonne volonté, certes, ne représentent pas grand-chose. Il faut au moins le soutien des prisonniers de guerre roumains. C’est ainsi que, le lendemain, Simion Mândrescu se rend au camp de Cittàducale où sont réunis de nombreux officiers transylvains prisonniers de guerre. À la suite des discussions, ils rédigent le procès-verbal suivant : « Les soussignés, inquiets, d’une part, du sort qui nous a été fait à nous, Roumains du territoire de l’Empire des Habsbourg, par la paix imposée à la Roumanie, et, d’autre part, des difficultés qui découlent de notre manque d’organisation, qui pourrait conduire à une absence totale d’activité. Nous, donc, qui avons non seulement le droit mais aussi le devoir de poursuivre le combat commencé par la Roumanie afin de forger l’unité nationale de tous les hommes de ce peuple, nous nous sommes réunis aujourd’hui, sous la présidence ad-hoc de M. Zaharia Babeu, et après débats auxquels ont pris part M. le professeur S. Mândrescu, M. le docteur Socaciu, M. Toacă et d’autres, à l’unanimité, nous avons pris les décisions suivantes : 1. instituer un Comité d’Action des Roumains de Transylvanie, Banat et Bucovine, dans le but d’unir en un seul organisme tous les Roumains se trouvant sous le joug Austro-Hongrois et se trouvant à l’heure actuelle dans les pays alliés, pour les organiser en une légion et faire la propagande nécessaire à la réalisation de notre unité nationale (…). »[7] Ce Comité, entendant s’inscrire dans l’idéal de la formation de la Grande Roumanie, déclare se soumettre au Comité Pour l’Unité Roumaine[8].
De son côté, Vladimir Ghika rédige un plan détaillé en vue de la formation de la Légion. Le texte n’est pas signé et Dumitru Zaharia, qui le publie, n’en indique pas l’auteur, cependant, le fait qu’il soit rédigé en (bon) français, le style très caractéristique ainsi qu’une mention où l’auteur évoque « le prince Stourza et moi » nous donnent la quasi-certitude que le texte est l’œuvre de Vladimir Ghika.
Ce plan détaille l’organisation du Comité pour l’Unité Roumaine : « Le Comité d’Action des Roumains de Transylvanie, Banat et Bucovine constitué pour la légion roumaine, doit se circonscrire dans une tâche de propagande interne et externe pour obtenir la meilleure, la plus rapide et le plus complet recrutement de la légion. Il n’a pas à sortir de là[9]. Il règle encore les détails de vie intérieure de la légion. [Le Comité de l’Unité Roumaine] divise provisoirement sur cette base les attributions générales du comité directeur vis-à-vis de lui : M. S. Mandresco, relations avec les autorités civiles italiennes, administration, affaires intérieures, de personnel, de propagande et de la légion. Prince V. Ghika, relations extérieures, partie diplomatique. Lieutenant prince Michel Stourza, affaires militaires, travaux de liaison avec les camps. » Puis Vladimir Ghika expose dans le détail la manière dont doivent être sélectionnés les volontaires.
Car, en fait, les premiers essais, faits sans doute avec un peu trop d’enthousiasme et sans trop de réflexion, ont des résultats plutôt négatifs. Comme on peut le voir dans ce compte-rendu italien : « Les officiers roumains mandatés par M. Mândrescu ont rendu visite au camp de Cavarzere, où se trouvent environ 13.000 prisonniers de cette nationalité, mais 70 hommes seulement ont déclaré être prêts à retourner comme volontaires sur la ligne de front pour s’enrôler dans les équipes se trouvant aux environs de celle-ci. »[10] On voit que l’enthousiasme des officiers n’était pas vraiment partagé par la troupe… Et le chef d’État-Major italien, Armando Diaz, de commenter : « La propagande doit être efficace et éviter les déceptions comme celle survenue il y a peu à Cavarzere, où certains officiers roumains, venus de Cittàducale, invitant les travailleurs prisonniers de leur nationalité à retourner combattre au front, jusqu’à la mort pour la patrie roumaine, n’ont obtenu l’adhésion que de 150 hommes sur les 3000 prisonniers se trouvant là. »[11] Mourir pour la Roumanie est moins attrayant pour un soldat prisonnier transylvain que de combattre victorieusement pour la libération de la Transylvanie de l’oppression étrangère ! Il faut savoir présenter les choses par leur bon côté, c’est tout l’art de la propagande.
Mais le problème du recrutement n’est pas le plus important. Très vite il y a de l’eau dans le gaz entre les trois membres du Comité pour l’Unité Roumaine[12]. Simion Mândrescu veut faire bande à part en s’appuyant sur les seuls Transylvains. Lui-même d’origine transylvaine, peut-être poussé à cela par Ionel Brătianu dont il est l’ami, peut-être tout simplement pour des problèmes d’égo, il déclare bientôt que la Légion s’adresse aux seuls Transylvains et non aux Roumains du Royaume. Peut-être veut-il également éviter que la direction du mouvement ne soit récupérée par ceux de Paris. Car, dans la capitale française, s’est formé un autre Comité, le Comité National des Roumains Irrédentistes, créé le 30 avril 1918 autour du célèbre ingénieur et aviateur Traian Vuia. Et lui aussi a pensé à organiser une légion, et comme l’immense majorité des Transylvains ont été faits prisonniers sur le front italien (en faisant abstraction du front russe, bien entendu) et se trouvent donc en Italie, ce Comité a délégué le célèbre pionnier de l’aviation Traian Vuia pour aller rendre visite aux camps de prisonniers. Mais voilà que ce dernier reçoit une fin de non-recevoir de la part des officiers de Cittàducale, probablement influencés par Simion Mândrescu. Traian Vuia ne comprend pas.
Il faut dire aussi que le Comité parisien a choisi le général Dumitru Iliescu comme futur chef de la légion. Or celui-ci est très décrié. Outre qu’il est considéré comme responsable de la défaite de l’automne 1916 pour n’avoir pas bien préparé l’armée roumaine, en tant que secrétaire du ministère de la Guerre jusqu’à l’entrée en guerre le 27 août 1916, puis comme sous-chef du Grand Quartier Général, il est aussi accusé par les journaux de s’être enrichi grâce aux fournitures de guerre. Sa cote est au plus bas en Roumanie et même ailleurs. Si, pour lui, la création de la légion est une bonne occasion pour se refaire une virginité politique, il discrédite quelque peu le mouvement par sa présence. Pour seul exemple du mépris des Roumains pour le général Iliescu, je ne citerai que le témoignage d’un officier roumain alors sur le front du Siret : « Le gouvernement – et le Grand Quartier Général dès le départ, le général [Dumitru] Iliescu – a été inconscient et pas préparé. La seule préoccupation du gouvernement a été le vol et les affaires. »[13]
Devant ces discordances dans le camp roumain, les autorités italiennes ne savent pas très bien sur quel pied danser. D’abord favorables à la création de la légion, elles ne savent quel parti prendre, celui de Mândrescu ou celui du couple Ghika-Sturdza, qui, tous deux, sont prêts à collaborer avec les Parisiens. Le gouvernement italien aurait tendance à prendre le parti de Mândrescu, non parce qu’il serait plus compétent, plus représentatif ou quoi que ce soit de ce genre, mais tout simplement par fierté nationale, parce qu’il représente un Comité né en Italie et non en France, ce pays qui s’accapare toutes les revendications nationales alliées…
Dans l’incertitude, le ministre des Affaires Étrangères italien demande son avis au baron Fasciotti, son ambassadeur en Roumanie. Sa réponse est intéressante et tranchée : « M. Mândrescu est originaire de Transylvanie. Il a fait de l’irrédentisme le problème principal de son activité et la source des revenus qu’il obtient. On ne sait pas bien s’il n’a pas été payé par le gouvernement hongrois ou le gouvernement français. En tous cas, il est certain qu’à l’heure actuelle il est payé par le gouvernement français. Ce n’est pas une personne sérieuse, et il ne faut pas trop se baser sur lui. J’ajoute, et cela doit rester entre nous, que le roi Ferdinand, me parlant de cet individu, m’a dit très récemment : „C’est une fripouille[14]”. M. Vladimir Ghika, frère de l’ex-ministre de Roumanie près de la Cour Royale, appartient à l’une des plus grandes familles et est une personne d’une respectabilité indiscutable. Mais il ne jouit d’aucun prestige parmi ses co-nationaux, n’étant connu que comme un grand agitateur catholique. Vu que la plus grande partie de la population roumaine irrédente appartient aux rites roumain-oriental et roumain-uni et qu’elle est très attachée à sa foi[15], je vous prie de le traiter avec la plus grande prudence. M. Sturdza appartient à une famille roumaine bien connue, mais c’est une personne peu sérieuse. M. Ghika m’a dit lui-même, du ton le plus confidentiel qui soit, qu’avec Sturdza il se serait intéressé au problème de l’armement des Transylvains, car il ne voudrait pas que M. Mândrescu, en s’interposant, ruine tout. Pour conclure, je prie le gouvernement de traiter avec le plus grand sérieux ce problème important avec les éléments roumains de Paris, qui jouissent d’un prestige réel et à propos desquels je suis prêt à fournir toutes les informations que vous considéreriez utiles de me les demander[16]. »
Le choix semble bientôt fait. Et d’ailleurs Vladimir Ghika et Mihai Sturdza partent pour Paris où se forme le Conseil National Roumain, qui regroupe l’ensemble des Roumains de l’exil. Voici le compte-rendu de séance que présentera plus tard Vladimir Ghika au Cardinal Gasparri, sous-secrétaire d’État de Sa Sainteté :
« Dans la séance du 6 septembre 1918, l’Assemblée Générale des Roumains actuellement à l’étranger, réunie au Siège de la Colonie Roumaine, à Paris, 114, Avenue des Champs-Élysées et comptant dans ses rangs, soit directement, soit par délégation, les notabilités les plus marquantes de Transylvanie, Bessarabie, Bucovine, Banat et Royaume de Roumanie, a conféré à MM. Jean Cantacuzène et Basile Lucaciu[17], en qualité de Présidents du Conseil National Roumain des pleins pouvoirs réguliers avec faculté de s’adjoindre d’autres collaborateurs s’ils le jugent nécessaire, après vote unanime de la Motion suivante :
L’Assemblée Générale des Roumains qui se trouvent en France, représentant la pensée libre du Roumanisme, – aussi bien celle du Royaume de Roumanie actuellement enchaîné que celle des territoires subjugués depuis plus longtemps, délibérant aujourd’hui, le 6 septembre 1918, sur les moyens propres à défendre la justice de notre cause nationale, cause pour laquelle la Roumanie a sacrifié son existence en se lançant dans la lutte aux côtés des nations qui avaient brandi le drapeau de la liberté des peuples, et cela pour suivre la voie de l’honneur et du devoir ;
Trouvant qu’il est urgent et nécessaire de charger quelques-uns d’entre nous ayant notre pleine confiance du soin de se mettre en contact avec les autorités des Puissances Alliées, pour soutenir en notre nom l’intérêt de la Race Roumaine en vue de l’union de tous les Roumains en un seul État national libre ;
Voyant parmi nous les deux personnalités dont l’arrivée en France a été saluée avec enthousiasme par tous les Roumains, le R.P. Basile Lucaciu, et le Dr Jean Cantacuzène, qui représentent parmi nous, comme ils l’ont représenté aussi dans la Roumanie libre, l’idéal national Roumain même, l’un comme Président de la Ligue pour l’Unité de tous les Roumains, l’autre comme Président de la Fédération Unioniste, élus tous les deux pour ces hautes dignités patriotiques par les chefs du mouvement politique et intellectuel roumain, et qui, en outre, ont apporté, l’un l’autorisation de parler au nom des Roumains émigrés en Amérique, l’autre celle de parler au nom des Roumains opprimés d’Autriche-Hongrie,
Nous décidons ce qui suit :
Le R.P. Lucaciu et le Dr J. Cantacuzène continuent à être les Représentants autorisés de l’Idéal National Roumain, et sont délégués pour se mettre en contact, au nom des Roumains, avec les autorités des Puissances Alliées. Nous les autorisons à constituer un Conseil National, choisi parmi les Roumains décidés à rester dans les pays alliés jusqu’à la paix générale, pour lutter d’une manière constante afin d’éclairer l’opinion publique mondiale sur nos aspirations nationales et de réaliser les droits na[tu]rels de la Nation Roumaine en une Grande-Roumanie. [18] »
Suivent quelque 140 signatures (c’est quand même autre chose que les trois noms du Conseil de l’Unité Roumaine fondé à Rome !). Parmi elles, l’on remarque celles d’Octavian Goga, de Constantin Diamandy, de Paul Brătăşanu, de Toma Ionescu, le frère de Take, de G. G. Mironescu, de Constantin Mille, etc. nombre d’anciens députés et sénateurs, de professeurs universitaires. Simion Mândrescu n’y apparaît pas, ni même Mihai Sturdza. Par contre Vladimir Ghika figure dans la liste des signataires avec cette précision : « en son nom et comme membre du Comité pour l’Unité Roumaine de Rome ».
Le rôle conféré à Vladimir Ghika au sein de ce Conseil nous apparaît plus clairement dans un texte conservé aux Archives Vladimir Ghika : « En vertu des pleins pouvoirs qui nous ont été confiés par l’Assemblée générale des Roumains tenue le 6 septembre 1918, nous soussignés, R.P. Basile Lucaciu et Docteur Jean Cantacuzène, Présidents du Conseil National Roumain, portons à la connaissance de Son Éminence le Cardinal Secrétaire d’État de Sa Sainteté le Pape, que nous avons donné délégation de nous représenter auprès de Sa Sainteté au Prince Vladimir J. Ghika, Docteur en théologie. Il a seul qualité pour traiter et résoudre en notre nom les questions relatives au mouvement irrédentiste roumain dans ses rapports avec le Saint-Siège. [19] »
C’est fort de cette accréditation que Vladimir Ghika rentre en Italie où il présente, le 2 octobre 1918, la création du Conseil National Roumain au Cardinal Gasparri : « J’ai l’honneur de porter à la connaissance de Votre Éminence la Constitution d’un Conseil national roumain chargé de conduire les affaires de l’irrédentisme Roumain et de représenter les revendications Roumaines auprès des Gouvernements alliés en les appuyant sur une organisation politique, militaire[20] et diplomatique. Je remets ci-joint à Votre Éminence le compte-rendu de la séance qui l’a élu, avec le texte de la motion votée et la liste des signatures des participants. Je joins à ces pièces, copie des pleins pouvoirs qui m’ont été conférés, pour tout ce qui peut, dans les affaires à traiter, regarder le Saint-Siège, par nos deux Présidents.[21] »
Mais, pendant ce temps, les discussions se poursuivent entre les groupes roumains et, le 3 octobre, est créé, autour de Take Ionescu qui vient d’arriver à Paris après avoir quitté la Roumanie en juin 1918 (via le port de Mourmansk, dans le nord de la Russie[22]), un Conseil remanié qui prend le nom de Conseil National de l’Unité Roumaine. Celui-ci écrit à Sydney Sonnino : « Les Roumains en exil, qui ne reconnaissent ni la paix de Bucarest ni la légitimité des actes qui l’ont suivie, ensemble avec ceux d’Autriche-Hongrie réfugiés en Occident, considérés par leurs compatriotes comme représentants les plus légitimes, ont constitué le Conseil National pour l’Unité Roumaine, fixant leur siège à Paris. Le gouvernement français a reconnu ce conseil par une lettre que nous a transmise M. Pichon, au nom du gouvernement de la République[23]. Nous nous adressons au Gouvernement Royal Italien, dont la sympathie pour les justes aspirations du peuple roumain est bien connue, et qui, entre autres, est lié à la nation roumaine par l’origine commune et une amitié solidement fondée, dont il ne s’est jamais départie, avec la prière de nous accorder la même reconnaissance. MM. Vasile Lucaciu, vice-président du conseil, Nicolae Titulescu, ancien ministre, ainsi que Vasile Dumitriu, Sever Bocu et loan Ursu, membres de cette institution représentative, aux côtés de Simion Mândrescu[24], membre du conseil, ainsi que de Vladimir Ghica et du capitaine Mihail Sturdza, nos délégués, doivent rendre visite à votre excellence au nom du conseil. Ils remettront à votre excellence une copie de la lettre de M. Pichon. La même délégation prendra contact avec les autorités militaires en vue de recruter des hommes pour la Légion Roumaine, mise sous le commandement du général Ferigo, qui a laissé en Roumanie un souvenir inoubliable[25]. Je me propose, monsieur le ministre, de me rendre moi-même à Rome le plus tôt possible, dans le but de présenter à votre excellence et à la noble nation italienne les remerciements des Roumains de toutes contrées, pour la chaleureuse sympathie dont a toujours jouit en Italie notre cause nationale[26]. »
Ce nouveau Conseil renouvelle les pouvoirs de représentation conférés à Vladimir Ghika : « Nous, soussignés, membres du Conseil National de l’Unité Roumaine, se trouvant actuellement en Italie, avons décidé de mandater le prince Vladimir Ghika, docteur en théologie, pour s’occuper de toutes les questions relatives au mouvement national roumain dans ses rapports avec le Saint-Siège. Signent pour le président : le Père Vasile Lucaciu, et en tant que vice-présidents du Conseil National de l’Unité Roumaine, N. Titulescu et J. Ursu.[27] »
C’est ainsi qu’en novembre 1918, Vladimir Ghika présente ses nouvelles « lettres de créances » au Cardinal Gasparri en ces termes : « En remerciant V.E. du bon accueil que vous avez bien voulu nous faire, à Monsieur Titulesco et à moi, je viens vous communiquer les pièces qui me permettent de commencer avec V.E. un utile travail pour le bien du pays et de l’Église. En les remettant à V.E. je me permets d’en demander un accusé de réception. Et je crois qu’il serait désirable de donner à cet accusé de réception une forme concertée, de nature à provoquer chez nous, au bénéfice du St Siège, l’effet moral le plus heureux. Par une rédaction bien calculée, on peut faire, de cette première prise de contact avec l’organisation Roumaine approuvée des Gouvernements Alliés, l’occasion d’un très-grand mouvement de sympathie pour le Souverain Pontife. Si le St Siège voulait, à propos de ces notifications et communications, me faire tenir un document du genre et du diapason de ceux que nous ont remis les Ministres des Affaires Étrangères de France et de Grande-Bretagne, il aurait chez nous le plus salutaire et le plus profond des retentissements. » Et il signe : « Vladimir I. Ghika délégué du Conseil National Roumain près le Saint-Siège ».
La « forme concertée » de la réponse à apporter par le Saint-Siège dont parle Vladimir Ghika est sans doute ce texte, qui se trouve dans les Archives du Vatican, qui est adressé à Vladimir Ghika, mais qui est de la main même de ce dernier :
« Mon Prince.
En vous accusant réception des pièces que vous m’avez remises et qui me communiquent la convocation de l’Assemblée Nationale de Transylvanie, la création d’un gouvernement provisoire avec un ministère où prend place en première ligne votre digne vice-président et le vote unanime prononçant la réunion de tous les pays habités par les Roumains à la mère-patrie – je me plais à vous signaler la profonde satisfaction que le St Siège éprouve à voir, suivant ces « légitimes aspirations des peuples » auxquelles il a dernièrement encore reconnu tant de droits, se consolider et se parfaire l’unité de la nation Roumaine avec laquelle il est heureux d’entretenir ses premières relations.
Depuis les premières heures de la chrétienté, depuis les jours lointains de Joannice, à qui notre grand Innocent III rappelait de façon si grave et si heureuse les devoirs et les privilèges de son origine latine jusqu’aux jours récents du Prince Couza, le St Siège n’a cessé malgré les malheureux effets des dominations étrangères, de suivre de près et d’aider de toutes les manières les populations Roumaines d’en-deçà et d’au-delà des Carpathes – « Deux fois romaine, pour tant de ses membres, par le sang et par la foi » comme le disait naguère Sa Sainteté Pie X, la nation Roumaine a toujours tenu de bien près au cœur du Pontife Romain. Et la colonne Trajane sur laquelle, au seuil de Sainte-Marie de la Victoire, la statue de Saint-Pierre, d’un geste perpétuel, paraît bénir votre race, semble indiquer au cœur même de Rome, tout à la fois votre acte de naissance, votre permanence glorieuse et votre chrétienne vocation.
Les pages les plus chères de votre histoire nous sont providentiellement communes.
V.E. le sait plus que tout autre, nos Archives du Vatican et de la Propagande où le passé de gloire et de souffrance des Roumains se trouve mieux raconté qu’ailleurs portent la trace des héroïques combats que, dans vos Croisades pour sauver l’Europe menacée par les Infidèles, vous avez soutenus avec l’appui matériel et moral, spontané ou sollicité, des Papes de l’époque. Nous y rencontrons les lettres de votre grand Étienne à Sixte IV, qui l’appelait en retour « l’athlète du Christ » et le « défenseur de la chrétienté » – celles échangées entre Michel le Brave, Grégoire XIV et Clément VIII pour la délivrance de l’Orient asservi – celles qu’au milieu du « seicento » s’écrivaient Alexandre VII, Clément X et votre ancêtre Grégoire Ghika II, prince de Valachie, ouvrier des victoires décisives de la Chrétienté à Levenez, à St Gothard, à Hotin[28].
Nos archives de la Propagande présentent à côté de votre vie nationale, le récit de votre résurrection, l’histoire et le secret de toute la renaissance Roumaine du XVIIIe siècle en Transylvanie, avec les noms de ces élèves du Collegio Urbano qui se sont faits dès lors les régénérateurs du roumanisme et qui se sont appelés Innocentius Clain, Sincaï, les Maïor, nobles travailleurs venus chercher et retrouver à Rome la vérité et la vie puisées au sol natal.
Si le monde, au cours des malheurs de votre histoire vous a trop oubliés, Rome s’est toujours souvenue de vous et s’est toujours efficacement occupée du pays que la Providence a mis au seuil du monde Oriental comme une sentinelle, un pionnier, une avant-garde.
De nos jours, Pie IX, par la création d’une province ecclésiastique régulière dépendant directement du St Siège à la nation Roumaine, je vous prie de transmettre au Conseil National Roumain, l’assurance d’une collaboration sympathique, que j’espère voir devenir fructueuse pour le bien des populations roumaine et de l’Église – à l’abbé Lucaciu, votre vice-président devenu ministre du gouvernement provisoire de Transylvanie, nos vœux les plus chaleureux.
Et au début d’une série de plus étroits rapports entre votre généreuse nation et le St Siège, rapports qui, je le répète, seront de notre côté, empreints de la plus paternelle bienveillance, j’exprime le souhait que votre emblème national, cette fille de l’aigle roumaine, cette aigle roumaine qui par une pieuse pensée de vos ancêtres tient la croix dans son bec, sache porter partout où elle étendra ses ailes, la civilisation chrétienne, source de tout bien et de toute prospérité.[29] »
La vraie réponse du Vatican, bien plus modeste, il faut bien le reconnaître, car le Saint-Siège désire conserver un juste équilibre entre anciens États belligérants, vient le 11 décembre 1918, de la main même du Cardinal Gasparri : « Avec la précieuse lettre de Votre Excellence, j’ai reçu les documents importants que vous avez eu le plaisir de m’envoyer, afin de commencer une œuvre prolifique pour le bien religieux du peuple roumain. Je tiens maintenant à assurer votre Excellence que le Saint-Siège ne peut pas ne pas nouer des relations avec un peuple de civilisation latine, envers lequel il a toujours nourri les sympathies les plus vives et les plus profondes. De fait, rien n’est plus agréable au Saint-Siège que de pouvoir apporter sa coopération à l’avenir meilleur de la nation roumaine, pour lequel il exprime ses vœux les plus fervents. Nul ne pourrait rendre cette coopération plus efficace qu’une personne telle que Votre Excellence, qui mérite déjà tant de sa religion catholique et de son pays. Pour confirmer, en attendant, ses sentiments bienveillants, le Saint-Siège est disposé à soumettre à présent à un l’examen des plus sérieux et des plus diligents le projet de concordat que Votre Excellence nous a remis. »[30]
Et c’est en cette qualité d’« ambassadeur » du Conseil National de l’Unité Roumaine que Vladimir Ghika annonce au Vatican d’abord les décisions de l’Assemblée des Roumains de Transylvanie, le 1er décembre 1918, puis, le 20 décembre 1918, sous l’en-tête « Consiglio Nazionale dell’Unità Rumena », la formation du gouvernement provisoire transylvain, le Conseil Dirigeant, dirigé par Iuliu Maniu, en ces termes : « J’ai l’honneur de faire connaître à V.E. qu’après convocation de l’Assemblée Nationale des Roumains de Transylvanie, devant un rassemblement populaire réunissant au cours d’une séance inoubliable plus de cent mille personnes dans la petite ville d’Alba-Iulia – a été votée l’union de la Transylvanie et des autres terres roumaines irrédentes au Royaume de Roumanie – un gouvernement provisoire a été constitué jusqu’à l’intégration complète du pays dans le susdit Royaume – et le Ministère suivant a été formé (dont le vice-président de notre Conseil National, le R. P. Basilio Lucaciu, est membre, en tant que ministre d’État, et cette nomination lui confère une autorité effective de nature à servir nos intérêts politiques et religieux). » [31] Suit la composition du Conseil Dirigeant, dans lequel sont soulignés les nombreux membres catholiques.
Ce à quoi le Cardinal Gasparri répond, le 31 décembre 1918 : « Je remercie sincèrement Votre Excellence pour l’importante nouvelle qu’elle a eu le plaisir de me communiquer avec son précieux courrier n° 2 daté du 20 décembre, avec les pièces jointes correspondantes. Je suis reconnaissant, par la même occasion, d’assurer V.E. que le Saint-Siège suit avec le plus grand intérêt et la plus grande sympathie les événements qui se déroulent au sein de la noble nation roumaine. »[32]
Outre le projet de concordat dont il est question plus haut, Vladimir Ghika, en tant que représentant du Conseil National de l’Unité Roumaine plaide, auprès du Saint-Siège, pour que soient reconnus les droits de la nation roumaine. C’est ainsi que nous trouvons, dans les archives du Vatican, un texte non daté mais qui doit être de la fin de 1918, voire du début de 1919, et qui résume la position de Vladimir Ghika, qui est d’ailleurs, aussi, à ce moment-là, celle du gouvernement roumain[33] :
« La Roumanie a tous les droits moraux et politiques à voir se réaliser désormais ses revendications nationales. Elle sait que les Puissances de l’Entente les reconnaissent pleinement en vertu des principes qu’elles incarnent et qui ont été, le 27 septembre 1918, formulés ainsi qu’on le sait par le président Wilson, avec cette précision que : “les solutions de la guerre sont nées de la nature même et des circonstances de la guerre. Tout ce que les hommes d’État ou les Assemblées peuvent faire c’est de les réaliser ou de les trahir.“
En vérité la question des Roumains de Hongrie s’est imposée par “sa nature même“ dès l’instant où l’on a proclamé les principes de la justice, de l’indépendance et de la liberté des peuples. Elle s’est, de même, imposée, par les “circonstances de la guerre“ quand les Alliés, par le traité du 4/17 août 1916, se sont engagés à assurer aux Roumains leur unité Nationale.
La Roumanie a exécuté, de ce traité, la part qui lui revenait. L’esprit de justice qui anime les Alliés leur a fait reconnaître que, dans la tâche commune des grands et des petits pays de l’Entente, la Roumanie est venue apporter loyalement et vaillamment sa contribution d’efforts, de sacrifices, et de résultats palpables ; car à l’un des moments qui auraient pu être décisifs en faveur de l’ennemi, l’action de la Roumanie a détourné des autres fronts et attiré sur elle-même une poussée de l’adversaire hors de toute proportion avec ses capacités de lutte et de résistance, et destinée à diminuer autant que possible, par son ampleur, les résultats qu’on était autorisé à attendre de l’intervention roumaine.
La “paix de Bucarest“ qui n’a jamais reçu ni la sanction du Roi ni la ratification du Parlement, ne saurait rendre caduques les stipulations du traité du 4/17 août 1916 ; car la Roumanie ne se la vit imposer qu’après la paix de Brest-Litowsk et l’assujettissement de l’Ukraine aux Empires Centraux ; c’est-à-dire alors qu’un état de fait rendait tout effort militaire sans espoir et que se créait un état de droit par lequel l’État représentant des Alliés aux côtés de la Roumanie, et celui dont on lui avait formellement promis la collaboration directe, la Russie, avait pactisé irrémédiablement avec l’ennemi.
Jusqu’à la dernière lueur d’espoir d’une partielle reconstitution du front russe, la Roumanie a su résister à toutes les menaces, de même que, jusqu’au dernier moment, elle avait tenu à résister à toutes les propositions qui, présentées avant la paix russe définitive, auraient pu lui valoir un traitement moins dur de ses ennemis. Les représentants officiels des Alliés près le Gouvernement de Sa Majesté ont reconnu que l’expédition tentée par l’armée Roumaine contre les Bolcheviks était bien le dernier effort militaire qu’on fût en droit d’exiger d’elle. Après cet effort, le grand souci que commandait l’intérêt général de l’Entente, était de conserver aussi intact que possible pour des temps meilleurs et de nouvelles disponibilités, l’armée Roumaine : c’est cette phase qui a commencé après la paix russe et qui vient de prendre fin. Il est naturel et juste que tout ce qui a suivi la paix de Brest-Litovsk et le passage de l’Ukraine aux mains de l’ennemi, soit considéré en ce qui regarde la Roumanie, comme nul dans son essence, ses modalités et ses résultats. Et c’est pourquoi dès que la chose est devenue possible, la Roumanie, sans perdre un seul instant, a tenu à reprendre avec ses Alliés une collaboration militaire[34], dictée par des engagements que ni le Roi ni le pays n’ont jamais voulu ni renier ni reconnaître dissous. »
C’est le dernier document qui témoigne de l’activité diplomatique « officielle » de Vladimir Ghika auprès du Saint-Siège à la fin de la Première Guerre mondiale.
Mais, au fait… qu’est devenue la légion roumaine d’Italie dans tout cela ? Eh bien, il faut du temps pour l’organiser et le 11 novembre 1918 arrive bientôt, jour de l’armistice sur le front occidental, mais aussi du retour en guerre de la Roumanie sur le front oriental. Ce qui fait que la Légation roumaine s’empresse d’annoncer au gouvernement italien, ce même jour : « La Légation Royale de Roumanie a l’honneur de communiquer à son excellence monsieur le baron Sonnino, ministre des Affaires Étrangères, qu’à partir d’aujourd’hui, cette légation traitera au nom de son gouvernement avec le Gouvernement Royal d’Italie toutes les questions relatives à la Légion Roumaine et aux prisonniers de guerre d’origine roumaine. »[35]
À part quelques éléments engagés dans l’armée italienne en tant qu’éclaireurs, les Roumains de la Légion n’auront pas eu le temps de participer aux combats de la fin de la guerre. Le recrutement des légionnaires se poursuivra pourtant. Plusieurs régiments seront formés et les soldats bientôt rapatriés par bateau en Roumanie (via la Mer Noire) pour être aussitôt renvoyés, non pas sur le front de Transylvanie, face aux troupes bolcheviques hongroises de Bela Kun, ni en Bessarabie pour y contrer l’avancée de l’Armée Rouge, mais… dans leur foyer. Il semble bien que le gouvernement roumain n’ait pas eu très confiance dans ces anciens soldats d’une puissance ennemie, armés et organisés par une puissance certes alliée, mais étrangère, et susceptibles d’avoir été contaminés par la fièvre bolchévique…
De son côté Vladimir Ghika se rendra à Paris pour participer à la Conférence de paix aux côtés de son frère Démètre, diplomate, mais c’est un autre chapitre de sa vie.
On voit donc que, finalement, Vladimir Ghika n’a plus eu à choisir entre la formation de la Légion d’une part et la représentation de la Roumanie auprès du Saint-Siège d’autre part. Les deux aspirations se sont combinées de manière quelque peu… miraculeuse !
[1] Archives Vladimir Ghika – ARCB, fond Institutul Vladimir Ghika, CLVII.P1.
[2] De qui pouvait bien venir cette proposition ? Du gouvernement roumain qui, isolé diplomatiquement après la paix de Buftea, se cherchait des alliés qui ne pouvaient ni faire partie de l’Entente ni de la Triple Alliance, le Vatican étant donc un bon candidat ? Nous ne le savons pas. Vladimir Ghika attendait très certainement du Roi un conseil sur la voie à suivre. Il semble n’avoir jamais eu de réponse, ou peut-être, ce qui paraît plus probable, n’a-t-il jamais envoyé cette lettre.
[3] Dumitru Zaharia, Legiunea Română din Italia : documente italiene, Editura Militară, Bucureşti, 2019.
[4] Mot sans doute erroné. Lire « revenir » ?
[5] L’appel du 18 juin ! On comprend mieux la sympathie qu’a éprouvée, semble-t-il, Vladimir Ghika pour l’action du général De Gaulle en 1940 !
[6] Dumitru Zaharia, op. cit., Doc. 45, original en italien.
[7] Dumitru Zaharia, op. cit., Doc. 47, original en italien.
[8] Dumitru Zaharia, op. cit., Doc. 56.
[9] On voit là la peur que le comité des officiers ne se transforme en soviet !
[10] Dumitru Zaharia, op. cit., Doc. 54, original en italien.
[11] Dumitru Zaharia, op. cit., Doc. 89, original en italien. Les chiffres donnés par ces deux témoignages sont discordants, peut-être s’agit-il de deux visites différentes, ou alors les chiffres ne sont pas très exacts. En tous cas, il est clair que ce ne fut pas l’enthousiasme parmi les soldats transylvains.
[12] Qu’en aurait-il été s’ils avaient été plus nombreux ?!!!
[13] Gheorghe Garoescu, Jurnal de front, vise de iubire, Editura Militară, Bucureşti, 2019. L’on pourrait citer de très nombreux témoignages de ce genre, peut-être en partie dus à l’amertume de la défaite.
[14] En français dans le texte.
[15] Le baron Fasciotti ignore-t-il que les Roumains unis sont catholiques ???
[16] Dumitru Zaharia, op. cit., Doc. 93, original en italien.
[17] Il vient de rentrer d’Amérique où, là aussi, il a posé les bases d’une légion de volontaires roumains. Cf. Augustin Juga [Iuga], Cu privire la Vasile Lucaciu – Acte, documente, procese, Baia Mare, Cooperativa notarilor, 1940, p. 387.
[18] J’ai donné l’intégralité du texte, d’abord parce qu’il est intéressant et ensuite parce que Dumitru Zaharia ne le donne pas.
[19] Archives Vladimir Ghika – ARCB, fond Institutul Vladimir Ghika, XXIV.
[20] Revoilà la Légion !
[21] Lettre de Vladimir Ghika adressée au Cardinal Gasparri, 2 octobre 1918, ASV, AES, Romania, III, Anno 1912-1922, Pos. 32-33, Fasc. 13, 84264. Tous les documents provenant des archives vaticanes ont été trouvés et transcrits par Clémence de Rouvray, que nous remercions pour cet important travail.
[22] Il semble aussi avoir fait un séjour en Angleterre pour régler la succession de sa défunte femme, qui était Anglaise, ce qui expliquerait son intervention tardive dans le jeu politique des exilés roumains de Paris.
[23] Le 12 octobre 1918.
[24] L’on voit là que Simion Mândrescu a fini par accepter l’autorité de ce nouveau Conseil.
[25] C’est l’ancien attaché militaire italien en Roumanie.
[26] Dumitru Zaharia, op. cit., Doc. 135, original en italien.
[27] 1918, AES, Ghika: Formazione del Consiglio Nazionale dell’Unita Romena, Prot. 84624.
[28] Qui osera dire après avoir lu cette phrase que le texte n’est pas de Vladimir Ghika ?
[29] ASV, AES, Romania, III, Anno 1912-1922, Pos. 32-33, Fasc. 13, 85025.
[30] Archives Vladimir Ghika – ARCB, fond Institutul Vladimir Ghika, CLXIV.
[31] ASV, AES, Romania, III, Anno 1912-1922, Pos. 32-33, Fasc. 13, 85025.
[32] Lettre du Cardinal Gasparri à Vladimir Ghika, 31 décembre 1918, Archives Vladimir Ghika – ARCB, fond Institutul Vladimir Ghika, LXXI.D1.P2.
[33] ASV, AES, Romania, III, Anno 1912-1922, Pos. 32-33, Fasc. 13, 85025.
[34] Il s’agit sans doute du retour en guerre de la Roumanie, le 11 novembre 1918. Ce texte est donc très certainement postérieur à cette date.
[35] Dumitru Zaharia, op. cit., Doc. 149. Original en français.
Luc Verly
Articol publicat în traducere, în revista Pro Memoria, nr. 17-18 / 2018-2019, p. 145-170.